Le projet de loi mettant fin à la recherche ainsi qu’à l’exploitation des hydrocarbures et portant diverses dispositions relatives à l’énergie et à l’environnement, a été voté au Sénat, bien que tous les groupes de gauche aient voté contre, ainsi que la République en Marche et le groupe République et Territoires, les indépendants. La version du texte telle qu’adoptée par le Sénat est une version entièrement détricotée par la droite sénatoriale.
Ci-après lune analyse de Ronan Dantec sur l’ensemble de la discussion. Et ici un lien vers l’article de libération
L’objectif initial du texte était de mettre la France en situation d’interpeller les autres pays, dans le cadre des négociations climatiques, sur l’exploitation de leurs ressources d’hydrocarbures, en laissant elle-même ses ressources dans les sous-sols. La portée du texte tel qu’issu des discussions à l’Assemblée Nationale avait déjà été atténuée notamment sur la question de l’équilibre économique des concessions en vue d’un arrêt des exploitations de gisements, renforçant la capacité des exploitants à maintenir une pression économique forte sur l’État pour une exploitation au-delà de 2040. Le texte issu du Sénat est quant à lui marqué par une approche court-termiste préférant les intérêts économiques acquis plutôt que l’urgence climatique. Le texte a été modifié de telle manière qu’il vise à assécher les exploitations de leurs dernières gouttes d’hydrocarbures avant qu’il ne puisse être possible de fermer les concessions. L’exclusion des territoires ultramarins du projet de loi, notamment la Guyane où pourrait se trouver des réserves importantes, aura démontré ce refus de la droite de prendre en compte l’urgence climatique.
Seulement deux points positifs sont ressortis des discussions au Sénat grâce à des amendements de Ronan Dantec et Joël Labbé. Davantage de transparence concernant l’exploitation des hydrocarbures a été instaurée, avec l’obligation pour les titulaires d’un titre ou d’une autorisation d’exploitation de remettre à l’autorité administrative, sous six mois, un rapport, rendu public, démontrant l’absence de recours aux techniques d’extraction interdites ; ou encore la réactualisation trimestrielle des informations mises en ligne relatives aux demandes de titres miniers portant sur toute la durée de vie d’un titre (octroi, prolongation, mutation, d’extension) pour que les informations transmises au public soient exhaustives. L’amendement de Ronan Dantec sur l’obligation pour les sociétés importatrices d’hydrocarbures sur le sol français de rendre publique, chaque année à compter du 1er janvier 2019, l’intensité d’émissions de gaz à effet de serre unitaire sur l’ensemble du cycle de vie par unité d’énergie des hydrocarbures importés, est important. Il ouvre la voix, à terme, à la possibilité de privilégier les hydrocarbures dont l’exploitation est la moins impactante pour l’environnement.
Dans l’hémicycle du Sénat, nous avons entendu toutes les postures qui font que nous n’avançons pas sur les négociations climatiques. Il y a eu du climato-scepticisme, non pas sur la responsabilité humaine dans le réchauffement, mais sur ses conséquences, notamment sur toutes les problématiques migratoires que nous connaissons (Syrie, région du lac Tchad…). Il y a eu du climato-fatalisme, certains affirmant qu’il ne sert à rien d’arrêter nos exploitations représentant 1% de notre consommation nationale puisque les autres pays ne le feront pas. Il y a eu, peut-être davantage encore, du climato-égoïsme, en privilégiant l’emploi local à court terme ou d’hypothétiques développements. Ils sont pourtant illusoires car l’exploitation pétrolière n’a jamais répondu au défi économique qui se pose sur les territoires en difficultés, notamment les territoires ultra-marins, et les ravages du changement climatique seront bien plus graves encore pour les activités et économies locales. Finalement, toutes ces postures ont affaibli la position de la France dans les négociations climatiques. En ayant un texte clair issu du Sénat, la France aurait été à la COP23 en situation d’interpeller les autres pays sur leurs exploitations pétrolières dans lesquelles ils continuent en investir massivement. Aujourd’hui, avec ce texte, ils nous répondront que si nous continuons chez nous, pourquoi ne le feraient-ils pas chez eux.