11 Décembre. Article de Yan Gauchard dans le monde : »Bruxelles a choisi la ville de l’Ouest comme sa  » capitale verte  » 2013, malgré le conflit lié à Notre-Dame-des-Landes »

Tiré du supplément Développement durable du Monde sur « La ville, clé de la survie de la planète », cet article détaille les politiques menées par l’agglomération lorsque Ronan Dantec était encore vice-président de Nantes Métropole à l’environnement et qui ont permis cette distinction.

Nantes, correspondant

On aurait pu croire à une plaisanterie, mais il n’en est rien. Jeudi 29 novembre, les édiles socialistes de Nantes ont gagné le théâtre du Vaudeville, à Bruxelles, pour recevoir le prix consacrant leur ville  » capitale verte de l’Europe 2013 « . Aucun élu écologiste n’était du voyage, pour cause de crise aiguë autour du projet du nouvel aéroport de Notre-Dame-des-Landes.  » C’était compliqué d’apparaître main dans la main avec les socialistes pour chercher ce prix, tant la tension était extrême sur le terrain « , admet Ronan Dantec, sénateur EE-LV de Loire-Atlantique, opposé à l’aéroport.

Confortée par ce titre européen, la majorité socialiste imagine que l’Union européenne adoube la future infrastructure ou en tout cas ne la juge pas antinomique avec la notion de développement durable.  » L’équation écologique tranche en faveur d’un nouvel aéroport, égrène Gilles Retière (PS), qui préside la communauté urbaine de Nantes Métropole depuis la nomination de Jean-Marc Ayrault à Matignon. Certes, on va détruire des zones humides et des espaces boisés pour réaliser ce transfert d’équipement mais en contrepartie, on va réutiliser des parcelles situées sur le site de l’actuel aéroport et de nombreux hectares aujourd’hui inutilisables, car trop exposés au bruit. In fine, le projet permettra de lutter contre l’étalement urbain. « 

Les élus écologistes s’insurgent d’une telle  » instrumentalisation  » et soulignent que dans son attendu explicitant son palmarès, l’Union européenne se garde de se prononcer sur la pertinence d’une nouvelle plate-forme.

Si la métropole a été distinguée parmi dix-sept candidats, c’est en récompense de ses  » bonnes pratiques environnementales « , notamment en matière de transport, de préservation des espaces naturels ou de consommation d’eau, énumère le commissaire européen à l’environnement, Janez Potocnik. La sixième ville de France succède ainsi à Stockholm, champion inaugural de la compétition en 2010, qui s’est engagé à renoncer à toute énergie fossile d’ici à 2050, Hambourg et la cité espagnole de Vitoria-Gasteiz.

 » Tous les habitants de Nantes vivent dans un rayon de 300 mètres autour d’une zone verte « , salue le jury qui a plébiscité la candidature de la cité des Ducs de Bretagne. Près de 15 % de la population utilisent les transports publics quotidiennement. Les experts ont aussi mis en avant quatre sites classés Natura 2000 et  » 33 zones naturelles d’intérêt floral, faunistique ou écologique « . Près de 60 % de la superficie terrestre du territoire sont  » consacrés à l’agriculture ou à des espaces verts « .

La métropole se colore aussi volontiers de bleu, avec 250 km de cours d’eau. Coup de génie, unanimement loué : la protection du site de la Petite-Amazonie, vaste étendue de 19 hectares au pied du quartier Malakoff, qui comporte un grand nombre de logements sociaux.  » La question de la biodiversité ne doit pas être cantonnée aux coins préférés des bobos « , estime Patrick Rimbert, qui a succédé à Jean-Marc Ayrault à la mairie de Nantes.

Bruxelles se félicite surtout de la mise en place  » d’un plan d’action ambitieux en matière de climat, qui vise à réduire de 30 % les émissions de CO2 par habitant d’ici à 2020 par rapport au niveau de 2003 « . Nantes s’est révélée  » pionnière en la matière « , note Philippe Marest, directeur général environnement de Nantes Métropole.

La part des transports alternatifs s’accroît. Tous les nouveaux bâtiments publics surgissant de terre se doivent d’être à la pointe des normes environnementales. La ville a récemment lancé la construction d’un programme d’une trentaine de logements sociaux à énergie positive – produisant plus d’énergie qu’il n’en consomme – l’un des rares chantiers du genre en France.  » Sur chaque opération de rénovation, précise M. Rimbert, la ville revoit l’isolation des bâtiments et les systèmes de chauffage.  » Près de 150 familles de tous horizons ont participé pendant un an à des ateliers pour s’imprégner de gestes éco-citoyens.

La ville se targue aussi de conjuguer la notion de développement durable dans les cantines des écoles, où près de 13 000 repas sont servis quotidiennement.  » On a multiplié par deux l’achat de produits bio depuis 2008, sans augmentation de tarifs pour les familles les moins aisées « , fait valoir Johanna Rolland, première adjointe au maire de Nantes.

Nonobstant le contentieux aéroportuaire,  » ce titre de capitale verte est justifié sur le fond, observe M. Dantec, qui était à la tête de la délégation portant la candidature nantaise en 2011. La municipalité, sous l’impulsion de Jean-Marc Ayrault, n’a pas raisonné sur des actions tape-à-l’oeil, pour faire écolo, mais s’est imposée des objectifs qualitatifs et quantitatifs.  »  » Ce prix, c’est la reconnaissance de l’action conjointe de cette majorité et c’est une invitation à continuer « , assure, consensuelle, Mme Rolland.

De nombreux colloques internationaux traitant de la thématique environnementale seront organisés à Nantes en 2013, notamment le sommet mondial des maires sur le climat en septembre.

Reste, en suspens, la  » question fâcheuse  » de l’aéroport, susceptible d’enrayer à tout moment la  » coproduction  » entre écologistes et socialistes. M. Dantec veut croire à un  » possible apaisement  » et espère un moratoire. Gilles Retière se montre plus prudent :  » On risque d’avoir du mal à déplacer des invités de marque. Un ministre ne peut plus arriver à Nantes sans provoquer une manifestation, ce n’est pas simple à gérer. « 

Yan Gauchard

© Le Monde

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