15 octobre 2015. Proposition de loi tendant à consolider et clarifier l’organisation de la manutention dans les ports maritimes : intervention de Ronan Dantec.

Intervention de Ronan Dantec dans la DG sur la proposition de loi dite « dockers » qui actualise le statut des dockers (4000 ouvriers dockers en France).
L’ensemble de la gauche a voté contre le texte modifié par la droite au Sénat parce que le texte initial résultait d’un accord fragile entre syndicats ouvriers et patronaux et que casser ce fragile équilibre remet en cause un dialogue social qui avait abouti…

Madame la présidente,
Monsieur le secrétaire d’État,
Mes chers collègues,

Permettez-moi de citer, en guise d’introduction à mon propos, les déclarations de Jean-Pierre Raffarin, ancien Premier ministre et homme d’expérience, il y a quelques jours, à propos du conflit d’Air France : « Avec les crises, la violence monte. Contre elle, il n’y a que le droit et les valeurs : dialogue, respect, cohésion. »

M. Ronan Dantec. Pour ce qui concerne le droit, nous avons constaté des difficultés d’application de la loi de 1992. Le Gouvernement n’a pas inventé les problèmes qui se posent à Fos-sur-Mer et qui l’ont conduit à confier à Mme Bonny la direction d’un groupe de travail chargé de formuler des propositions de nature à répondre à cette insécurité juridique.

Le rapporteur, que j’ai écouté attentivement, a une approche « culturelle » étonnante. Selon lui – je ne pense pas trahir son propos ! –, chaque port a sa culture, et il convient de la respecter.

Je suis impressionné !

Certains, ici, savent à quel point je suis attaché à la question du droit culturel. Mais faire du respect de la diversité culturelle de nos us et coutumes en vigueur dans chaque territoire un argument politique pour détricoter un accord social de branche, c’est une première !

Certes, la réforme du code du travail est sur la table. Certains voudraient le simplifier, et je ne suis pas nécessairement d’accord avec toutes les raisons qu’ils avancent… En tout cas, si l’on ajoute la dimension de la diversité culturelle dans le code du travail, cela ne va pas faciliter la tâche de simplification !

Quoi qu’il en soit, monsieur le rapporteur, j’espère que vous soutiendrez autant la diversité culturelle quand il s’agira de modifier la Constitution pour sauvegarder les langues régionales. Je saurai alors vous rappeler vos propos d’aujourd’hui !

M. le secrétaire d’État me le confirmera, je ne crois pas qu’il ait jamais été question d’harmoniser les langues utilisées sur les quais, une harmonisation contre laquelle je me serais évidemment dressé et j’en reviens au droit du travail.

Pour reprendre les termes de Jean-Pierre Raffarin, il est bien question ici des valeurs que sont le dialogue, le respect et la cohésion.

En matière de cohésion, nous avons, me semble-t-il, réellement progressé. Il y a eu, je ne le nie pas, dans les ports français, des moments difficiles, des affrontements, liés à un manque de dialogue social, ainsi que des périodes de fragilisation économique. Mais la loi Le Drian de 1992 avait déjà réussi à éliminer bien des blocages.

Les chiffres semblent montrer que l’activité des ports français est maintenant repartie dans le bon sens.

Il importe – c’est notre responsabilité collective ! – d’accompagner la reprise du dialogue, de favoriser cette vision partagée, qui a bien progressé. Aussi, je ne vois pas l’intérêt de fragiliser cette démarche.

Je rejoins les propos de M. le secrétaire d’État : dans une société en souffrance, une société anxieuse, veillons à envoyer le bon message aux acteurs concernés, même si leurs intérêts sont parfois divergents, pour qu’ils arrivent à discuter et trouver un accord. Si nous n’accompagnons pas le dialogue, nous renforcerons le sentiment déjà très répandu que nous sommes dans un théâtre de postures, des postures auxquelles nous nous conformerions un peu trop en pensant que c’est ce qu’attendent nos électeurs. Or, selon moi, aujourd’hui, les Français attendent de nous que nous prenions en compte l’intérêt général et que mettions un peu d’huile dans les rouages, pour apaiser la société.

En l’espèce, je déplore que la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable, dont les avis sont souvent inspirés par un souci d’apaisement, adopte une position politique qui ne me semble pas de nature à porter le bon message, surtout quelques jours après le conflit d’Air France. Là aussi – je tiens à le dire même s’il s’agit d’un autre débat –, il conviendrait peut-être d’envoyer quelques signaux d’apaisement.

Pour conclure, j’évoquerai l’avenir du transport maritime.

En tant qu’écologistes, nous sommes extrêmement soucieux du devenir des ports. Le transport maritime constitue en effet, à nos yeux, une alternative majeure au transport routier. Il s’agit d’un enjeu important à quelques semaines de la COP 21.

Nous avons précédemment défendu, notamment dans mon département de Loire-Atlantique, les autoroutes de la mer. Nous restons convaincus de l’importance du cabotage, qui renforcerait les petits ports et leur culture spécifique. Soulignons également l’importance du transport combiné entre le transport maritime et le transport fluvial, qui nécessite des créations d’emplois de dockers et de manutentionnaires.

Le signal que nous devons donner, c’est celui de notre volonté d’accompagner les partenaires sociaux dans cette voie.

Je profite de l’occasion pour souligner que nous nous mobilisons aussi pour l’intégration du transport maritime dans les objectifs de réduction et de régulation des émissions de gaz à effet de serre à l’échelle mondiale.

Il faut absolument mettre sur la table de la négociation internationale, à Bonn, dans quelques jours, le transport maritime et le transport aérien. Il faut que ceux-ci contribuent, eux aussi, au développement d’une économie décarbonée.

Je tenais à évoquer ce sujet devant vous, monsieur le secrétaire d’État, car cela aurait probablement quelques impacts sur l’activité de certains de nos ports. Ainsi, les navires qui empruntent le canal de Suez pourraient passer par les ports méditerranéens, dont Marseille, plutôt que par ceux du nord de l’Europe.

La France aurait donc tout intérêt à traiter au plus vite la question de la réintégration du transport maritime et du transport aérien dans le texte devant faire l’objet des négociations sur le climat. Pour suivre ce dossier, je sais combien il est complexe, mais il s’agit là d’un enjeu important.
Quoi qu’il en soit, le groupe écologiste respecte le dialogue social, qui a permis de parvenir à un accord, dont la proposition de loi qui nous est soumise est l’aboutissement. Aussi, nous voterons contre toute modification du texte issu des travaux de l’Assemblée nationale.

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