19 décembre 2013. Intervention lors du débat sur les conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi métropoles.

Pourquoi le groupe écologiste ne pouvait pas voter la version finale du projet de loi sur les métropoles.

Intervention dans la discussion générale sur les conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi sur la modernisation de l’action publique et l’affirmation des métropoles

Monsieur le Président,

Madame la Ministre,

Chers collègues,

Je voudrais tout d’abord rendre hommage à Marylise Lebranchu qui a mené à son terme cette première loi de décentralisation, point d’équilibre entre des approches tellement divergentes de l’organisation territoriale de nos territoires que pouvoir se prononcer aujourd’hui sur un texte de CMP est en soi un tour de force. Je salue donc la ténacité et l’engagement de Madame la Ministre et je sais que nous partageons des idées communes sur les grands axes de la nécessaire modernisation administrative de notre pays.

Mais point d’équilibre ne rime pas avec élan et il n’y a malheureusement pas dans cette loi toutes les clarifications de renforcement des compétences qui en feraient un véritable acte 3 de la décentralisation qui nous avait été annoncé.

Les débats ont malheureusement conforté, et ce n’est pas le seul exemple, une société qui tel un canasson un peu fourbu, renâcle devant l’obstacle, le contourne plutôt que de le franchir. Dans cette course d’obstacles que fut le parcours législatif de ce projet de loi, chaque réseau de collectivité a rajouté ses barrières, mis la barre trop haut ou élargi la rivière, et ainsi ralenti l’avancée d’une loi pourtant nécessaire tant ce pays est handicapé par ces enchevêtrements administratifs, une imbrication de compétences qui obscurcit le débat démocratique et nourrit l’éloignement des citoyens qui ne comprennent pas très bien qui décide quoi.

Si je prends l’image du canasson, c’est aussi parce que c’est bien la France du cheval qui continue en partie de tenir les rênes. On a coutume de dire que c’est la distance parcourable en une journée à cheval qui a déterminé la taille des départements actuels, et le même critère mais à pied celle des communes. A l’heure du tramway, du bus et de la voiture, l’agglomération et la région sont des territoires de mobilité bien plus pertinents et l’ambition, que nous continuons de soutenir, de cette nouvelle décentralisation, devait bien être de les renforcer, car ce sont les lieux de vie et de perception territoriale.

En tant qu’écologiste, nous nous félicitons que la région ait obtenu un statut de chef de file dans plusieurs domaines, notamment environnementaux, et que les intercommunalités, les communautés urbaines et les métropoles – même si ce dernier mot reste contestable – que les intercommunalités donc, voient leurs compétences renforcées. Mais nous n’avons guère touché à l’édifice et réduit encore la capacité de coordination et de leadership régional avec la réduction des attributions du lieu censé coordonner les actions des uns et des autres, ce qui est particulièrement dommageable.

Surtout, nous n’avons pas réussi à répondre de l’enjeu démocratique du suffrage universel direct pour les intercommunalités, lieu clé de la décision publique, lieu de débats fondamentaux concernant directement la vie quotidienne des habitants (le logement, le transport, le développement économique…) mais sans que l’exécutif ne soit directement choisi par les citoyens. Ici la cavalerie des pouvoirs locaux établis a sonné la charge au son du clairon, et guère permis qu’on avance un peu sereinement dans le débat.

De ce fait, la perspective, même hypothétique, d’une loi en 2017, qui pourrait introduire une dose de proportionnelle intercommunale pour les élections des conseillers communautaires, peut presque apparaitre comme une victoire, brisant le tabou d’un scrutin direct.

Malheureusement, et notre désappointement est ici très grand, le paragraphe suivant de l’article dont il est ici question, par une cabriole inattendue, et je salue ici les artistes de la CMP, quel talent ! Le paragraphe suivant donc, énonce que le suffrage universel direct sera déjà appliqué dès 2014 pour l’élection des conseillers communautaires, par l’instauration d’une liste communale spécifique des conseillers communautaires, et que c’est l’expérience de ce scrutin qui servira de base à la future loi. Ouverture phrase 1 / Fermeture phrase 2 : c’est d’excellent niveau pour un texte de synthèse de congrès que même les écologistes, pourtant experts, n’auraient pas réussi à écrire, mais pour une loi, c’est quand même très déconcertant, pour ne pas dire inquiétant, et clairement inacceptable pour les groupe écologiste, qui considère qu’il n’y a de véritable décentralisation qu’adossée au renforcement des processus démocratiques.

A Rennes vendredi dernier, le Premier ministre a insisté sur le renforcement du pouvoir des régions indiquant, je cite que «Nous avons besoin de régions fortes, innovantes et influentes, capables de se mobiliser pour tirer vers le haut la croissance du pays. Cela passe évidemment par un approfondissement de la décentralisation» Ce devra être l’objet de la 2ème loi de décentralisation qui sera présentée en avril prochain au Parlement, selon les annonces du Premier ministre. Nous ne pouvons que nous retrouver dans son propos, mais nous pouvons néanmoins douter de la capacité à aller aussi loin dans la réforme, vu les oppositions qui se sont coalisées lors de l’examen de ce premier projet de loi.

Nous rêvons donc déjà de pouvoir voter avec enthousiasme le deuxième projet de loi sur le renforcement des régions, mais, pour l’instant, c’est bien le sentiment d’une occasion, en partie gâchée pour le renforcement de l’efficacité de l’action publique et d’une nouvelle démocratie locale adossée aux réalités des véritables territoires de vie que nous constatons. C’est pourquoi nous voterons contre le résultat de cette CMP.

 

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