Intervention de Ronan Dantec lors de la lecture des conclusions de la commission mixte paritaire sur le Projet de loi « Climat et Résilience » pour lesquelles le groupe Ecologiste, Solidarité et Territoires a voté contre
(seul le prononcé fait foi)
Monsieur le président, madame la ministre, mesdames et messieurs les rapporteurs, chers collègues,
Je voudrais tout d’abord remercier ici les 150 membres de la Convention citoyenne pour le climat, leur dire, même s’ils en doutent eux-mêmes parfois, que leur travail n’a pas été inutile, et qu’ils auront montré la voie pour une prochaine loi climat et qui ne saurait beaucoup tarder car évidemment la loi que nous votons aujourd’hui ne répond pas, nous le savons tous, aux enjeux quantitatifs, de réduction des émissions de gaz à effet de serre, tels que nous le demande la communauté scientifique notamment le GIEC.
Lundi dernier, sénatrices et sénateurs et député.e.s ont donc trouvé un accord en commission mixte paritaire, ce qui est généralement une bonne chose, car cela préserve, toujours, une part du travail d’amélioration des textes, qui est un des objets du bicamérisme et de la navette parlementaire. J’en profite d’ailleurs pour saluer les rapporteurs pour leur important travail, dans un temps très court. Ils n’ont pas ménagé leurs efforts, et sont restés attentifs aux propositions des différents groupes du Sénat, qu’ils en soient remerciés.
Mais clairement aussi ce travail parlementaire montre aussi que la recherche de compromis nous amène à des mesures à minima totalement insuffisantes. Or justement, de manière quasi unanime, le Sénat avait tenu à mettre en premier article de ce texte, le respect de l’objectif européen de réduction de 55% des émissions de gaz à effet de serre en 2030, et sa déclinaison française. Nous connaissons depuis quelques jours la proposition de la Commission européenne pour la France, – 47,5% en 2030. Cela signifie donc, si on considère, c’était l’avis des experts, que la loi actuelle nous amène vers les -30, -35% de réduction des émissions en 2030, qu’il nous faudra dans les toutes prochaines années, rehausser fortement notre ambition, voter de nouvelles mesures à fort impact carbone, et nous aurons donc sans nul doute, alors, à nous replonger dans les propositions de la Convention citoyenne.
Certains ont pu trouver, et en premier lieu le gouvernement, mais reconnaissons-le, la majorité sénatoriale n’était pas très loin derrière, que les propositions de la Convention citoyenne étaient parfois trop ambitieuses, que la France n’était pas prête le gouvernement décidant au final de ne pas respecter la parole présidentielle de proposer sans filtre au Parlement les propositions de la Convention Mais en fait, ces propositions étaient finalement assez modérées, aux vues de certaines de mesures proposées aujourd’hui par la Commission européenne, comme la fin de la vente des véhicules thermiques en 2035, ou l’objectif de production de 40% d’énergie à partir de sources renouvelables dès 2030. Chère Sophie Primas, le nucléaire n’en fait pas partie. Ainsi, nous allons voter une loi assez largement périmée par rapport aux discussions européennes et nous devons déjà nous préparer pour 2023, par exemple, au moment de la discussion de la programmation pluriannuelle de l’énergie nous préparer à adopter un autre texte, raccord avec le cadre européen, le débat ne fait donc que s’ouvrir. Je n’ai pas le temps en quelques secondes de présenter les principales avancées ni les reculs de ce texte. La dotation climat pour les collectivités, dont le gouvernement ne veut toujours pas entendre parler, est un signal vers les territoires qui était pourtant attendu, tant ce sont eux qui ont en partie les réponses qualitatives en agissant sur nos quotidiens. La redevance sur les engrais azotés, encore reportée, alors que pourtant l’Europe met aujourd’hui en discussion la neutralité sur les émissions liées aux engrais dès 2035, les obligations de rénovation thermique toujours retardées, la TVA à 5,5% sur les billets de train.
Quelques satisfactions néanmoins… la préservation des recettes de la taxe sur les billets d’avion dite « taxe Chirac», 400 millions annuels pour la lutte contre le sida et pour l’Agence de financement des infrastructures de transport de France (AFITF), l’interdiction des engrais azotés sur les espaces non agricoles. Chers collègues, depuis que nous avons amorcé nos débats, le village de Lytton au Canada, qui avait enregistré 49,6 degrés de température un record absolu, a brûlé à 90%, et en Allemagne, nous savons, c’est par centaines que se comptent les victimes et par milliards les dégâts des dernières inondations. Nous nous devions donc de crédibiliser, par nos propres mesures, l’engagement européen, le seul levier susceptible d’entraîner, avant la COP de Glasgow, une dynamique pour un effort mondial équitablement réparti et à la hauteur de l’enjeu. Cette loi ne répond pas à cette urgence, c’est pourquoi le groupe écologiste n’a d’autre choix que de voter contre le résultat de cette Commission mixte paritaire.