A l’occasion des Assises de l’énergie à Dunkerque, la Gazette des communes a recueilli les réactions des différents acteurs de l’énergie à l’approche du projet de loi sur la transition énergétique.Loi sur la transition énergétique : le grand flou
Gazette des communes (O. Descamps | 03/02/2014)
Les contours du projet de loi sur la transition énergétique ne sont toujours pas dessinésRéunis à Dunkerque pour les quinzièmes assises territoriales de l’énergie 28 au 30 janvier 2014, les représentants des collectivités espéraient un signe du gouvernement… En vain. Six mois après la fin du débat national, les contours du projet de loi sur la transition énergétique ne sont toujours pas dessinés.
« Certains pensent qu’on traîne un peu. Pas moi. Il faut prendre le temps nécessaire pour que la loi soit bien posée ». Président de l’Ademe, Bruno Léchevin affichait son optimisme jeudi 30 janvier à l’occasion du grand débat sur la transition organisé lors des assises de l’énergie. Ils sont de moins en moins à adopter cette posture. « Si le point d’arrivée est fixé, le cap ne l’est toujours pas », regrette le sénateur Ronan Dantec, pas franchement convaincu par le discours du ministre de l’Ecologie. Par le biais d’un enregistrement vidéo, Philippe Martin a rappelé quelques engagements faits par le président de la République lors de la conférence environnementale comme la volonté de diviser par deux la consommation énergétique à l’horizon 2050. Il n’a en revanche rien annoncé de notable concernant les orientations du projet de loi qui doit en théorie être présenté à l’assemblée en avril.
En attendant que les premiers arbitrages soient rendus, le débat continue. Et tout le monde voit midi à sa porte. « Il faut obliger les distributeurs d’énergie, comme nous, à délivrer chaque année des passeports rénovation avec des diagnostics pour les logements les plus énergivores et des propositions de travaux», souligne Gérard Mestrallet, président de GDF-Suez, lorgnant sur la manne que représente le marché de l’efficacité énergétique. « La loi sera un succès si elle n’oublie pas les questions de santé publique et de pollution atmosphérique », estime Régine Lange, présidente de la fédération Atmo. « Il faut des mesures sociales contraignantes en matière de précarité énergétique », ajoute Dominique Olivier, secrétaire confédéral chargé du développement durable à la CFDT.
Un droit à l’expérimentation
Les collectivités n’échappent pas à la règle. Elles aussi demandent des évolutions réglementaires concrètes pour les territoires qu’elles administrent. « Si le texte n’est pas une loi de décentralisation, on n’ira nulle part car il n’y aura pas de mise en œuvre », résume Michel Delebarre, sénateur et maire de Dunkerque. Elles devraient être entendues sur l’essentiel. « Tout le monde est d’accord pour dire que les collectivités doivent avoir plus de pouvoir, lance Raphaël Claustre, directeur du Cler. Mais dans la loi, il va falloir être concrets »… Le large consensus pourrait bien vite voler en éclat.
Les élus semblent d’accord sur un point. « Il faut un droit à l’expérimentation pour les territoires », insiste Emmanuel Cau, vice-président de l’ARF, citant l’exemple de la rénovation énergétique. Puisqu’il semble difficile de prendre une décision au niveau national, quelques collectivités pourraient tester l’interdiction pour les propriétaires de louer des logements équipés de chauffages électriques et affichant des performances énergétiques classées E ou F. Voire une imposition majorée pour les habitations les moins performantes. « On ne peut pas demander aux territoires d’être innovants si on ne leur donne pas les moyens », acquiesce Bruno Léchevin.
Gare aux prochaines lois de finances
« On pourrait avoir une loi d’équilibre politique pour faire plaisir à chacun. Mais si c’est le cas, on va s’épuiser. Il faut trouver un ensemble cohérent », prévient Ronan Dantec. Avant de trancher les questions complexes, la loi doit entériner certains engagements. Alors que « l’électricité renouvelable est devenue un véritable punching-ball », dixit Raphaël Claustre, « arrêtons de remettre sur la table toutes les questions en permanence ». Pour écrire le texte, « il faut un engagement plus fort du (des) ministre(s) qui s’occupent de l’énergie, y compris à Bercy », insiste-t-il.
Les élus espèrent enfin que la transition énergétique ne s’arrêtera pas à cette loi. Les prochaines lois de finances pourraient avoir un rôle majeur à jouer. Conscient qu’elles « ne sont pas toujours écrites avec les mêmes intentions », Michel Delebarre réclame que la loi présentée au printemps apporte « des indications programmatiques qui contraindront les prochaines lois de finances ». Une chose est sûre. « La prochaine grande conférence sur le climat ayant lieu à Paris, on ne peut pas se permettre de voter un texte décevant et de donner un signe négatif », conclut Jean-Patrick Masson, adjoint au maire à Dijon.