3 novembre 2022. Accélération des énergies renouvelables- Intervention de Ronan Dantec

En tant que chef de file pour le groupe Ecologiste-Solidarité et Territoires, Ronan Dantec est intervenu sur le projet de loi visant l’accélération de la production des énergies renouvelables. Il a insisté sur l’urgence à agir après tant de retard cumulé et d’occasions manquées pour mettre les politiques publiques en cohérence avec nos objectifs énergétiques. Il a dénoncé une réécriture du texte initial du gouvernement par la droite sénatoriale qui limite considérablement les perspectives de développement des énergies renouvelables, en contradiction complète avec l’urgence climatique et la crise énergétique actuelle. Pour Ronan Dantec : “L’acceptabilité des projets est pour nous un enjeu majeur qui passe par des échanges approfondis en amont des projets et le partage de la valeur, mais elle ne peut se traduire par un droit de veto des élus locaux incompatible avec les enjeux d’une transition énergétique massive et rapide.”

 M. Ronan Dantec. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, enfin, l’État reconnaît que, face à la très grave crise énergétique que nous vivons, nous n’avons qu’une seule solution : le développement rapide et massif des énergies renouvelables, notamment pour la production d’électricité ! (« Et le nucléaire ! » sur des travées du groupe Les Républicains.) Enfin !

Toutefois, cette loi arrive malheureusement bien tard, presque huit ans après que la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte a fixé à l’horizon 2025 le rééquilibrage du mix énergétique français entre le nucléaire et les énergies renouvelables.

Huit années auraient suffi pour développer une réelle stratégie territoriale et industrielle et pour mettre les politiques publiques en cohérence avec les objectifs fixés par la loi. Force est de constater que ce temps a été gaspillé, au détriment de notre économie et du pouvoir d’achat des Français. Nous sommes aujourd’hui le seul pays européen à ne pas atteindre les objectifs de développement des énergies renouvelables prévus dans la directive-cadre de 2009.

En urgence, le Gouvernement nous dit son intérêt, voire son empressement, en faveur des énergies renouvelables, que Mme la ministre a qualifiées hier matin sur une grande radio nationale d’« ultra-compétitives ».

L’État s’étant rallié à l’analyse de notre groupe Écologiste – Solidarité et Territoires selon laquelle notre salut passait par les énergies renouvelables – Mme la Première ministre a même évoqué « une question de survie » –, nous accueillons favorablement ce projet de loi, mais – car il y a un « mais » – nous nous interrogeons tout de même sur son efficience.

Pour commencer, le retard du développement des énergies renouvelables nous semble d’abord lié au prix trop bas proposé par la Commission de régulation de l’énergie (CRE), qui empêche le succès complet des appels d’offres. Si ces dispositifs produisent clairement l’électricité la moins chère, les tarifs sont trop peu élevés.

Madame la ministre, j’entends votre préoccupation de ne pas créer de superprofits injustifiés pour les entreprises du secteur – que vous vous interdirez en outre de taxer ensuite –, mais avec quelques euros de plus sur les tarifs d’achat garantis, les énergies renouvelables resteront de loin les moins onéreuses. (Mme Sophie Primas s’exclame.)

Ensuite, une autre cause de retard relève de la prudence des investisseurs, qui attendent que tous les recours, même ceux qui ne sont pas suspensifs, soient purgés. Sur ce point, un amendement du rapporteur de la commission du développement durable, dont je salue l’engagement sur ce texte, a très opportunément conduit à créer un fonds de garantie mutualisant les risques liés aux recours contentieux. Il s’agit probablement de la disposition qui nous permettra de gagner le plus de temps dans la mise en œuvre des projets. Les gains à espérer sur les simplifications administratives apparaissent assez secondaires en comparaison.

Notre groupe reste très vigilant pour s’assurer que ce texte ne détricote pas le droit de l’environnement et ne s’applique pas en dehors des énergies renouvelables, au risque d’affaiblir le principe de non-régression de ce droit.

Le Gouvernement a entendu l’avis négatif très ferme du Conseil national de la transition écologique (CNTE) et le texte a été modifié dans le bon sens depuis sa première présentation. Certains points sont néanmoins toujours problématiques, s’agissant, notamment, des enjeux de biodiversité. Nous y reviendrons durant le débat.

Restent les lignes rouges allègrement franchies par la majorité sénatoriale, laquelle a fait de ce projet de loi un texte de ralentissement plus que d’accélération. (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)

Le droit de veto accordé aux maires sur des aménagements reconnus, par ailleurs, comme relevant de l’intérêt général est étonnant ; il s’agit d’une mesure proche de l’oxymore. Elle constitue d’ailleurs un revirement historique de la part d’un mouvement aux racines gaullistes et jacobines,…

M. Olivier Paccaud. Démocratiques, tout simplement !

M. Ronan Dantec. … toujours fier de mettre en avant les épopées industrielles du pompidolisme.

Dans le cas qui nous occupe, c’est l’inverse qui se produit : l’intérêt national s’efface devant les enjeux locaux. Il s’agit d’une première, qui ouvrira la porte à l’interdiction par décision locale, ici d’un bout de ligne de TGV, là-bas – pourquoi pas ? – d’un petit réacteur nucléaire. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme Sophie Primas. Et la participation citoyenne ?

M. Ronan Dantec. Il va devenir très compliqué de mettre en place une stratégie nationale. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)

M. Olivier Paccaud. Écolo-dictature !

M. Ronan Dantec. De même, renvoyer les éoliennes en mer à 40 kilomètres des côtes en interdit le développement sur la majorité du littoral.

M. François Patriat. Très bien !

M. Ronan Dantec. Je veux bien qu’un léger inconfort pour des propriétaires de résidence secondaire avec vue sur mer (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.) soit plus important que l’avenir de notre industrie et que la facture énergétique des Français, mais je m’interroge tout de même sur le sens de certaines priorités.

M. Rémy Pointereau. C’est minable !

M. Ronan Dantec. Le maintien de ces deux barrières nous conduirait à ne pas voter ce texte, mais nous espérons que le bon sens collectif l’emportera. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST, ainsi que sur des travées du groupe SER. – M. Jean-Pierre Corbisez applaudit également.)

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