A propos du projet d'aéroport du grand ouest, vous trouverez ci-dessous et ici un très bon article de J. Le-Brigand publié dans la Gazette des communes et relatif à la lutte d'influences qui se joue entre collectivités.

Notre-Dame-des-Landes, des enjeux et luttes d'influence entre collectivités locales

Par J. Le-Brigand Publié le 28/11/2012

Notre Dame des Landes, c'est aussi une lutte d'influence entre collectivités locales. Parmi les arguments avancés en faveur de l'aéroport nantais figure sa vocation interrégionale, d'où son nom « aéroport du Grand Ouest ». Mais rien n'indique que les villes de ce territoire renonceront à leurs ambitions dans ce domaine. Au contraire.

L'Etat, maître d'ouvrage, et les collectivités qui l'accompagnent, ne cessent de le marteler : le projet d'aéroport à Notre-Dame-des-Landes est « un investissement d'avenir » au service des intérêts communs de la Bretagne et des Pays de la Loire.

Se pose alors en creux la question des équipements existants et leur éventuelle redondance, ce que soulignait déjà en 2003 Jean Bergougnoux, président de la commission du débat public.
Il écrivait ainsi qu'à « défaut d'être l'aéroport du Grand Ouest, concept d'autant plus flou qu'aucune fermeture d'aéroport existant n'était envisagée, NDDL pourrait être le plus grand aéroport de l'Ouest ».

Une formule très diplomatique qui n'a rien réglé sur le fond. A l'époque, une étude montre que l'essentiel de la clientèle de l'aéroport de Nantes Atlantique pour les vols réguliers provient de la Loire-Atlantique et des départements limitrophes, le rayon s'élargissant pour les vols charters.

En septembre 2010, Patrick Mareschal met les pieds dans le plat. Celui qui est alors président socialiste du conseil général de Loire-Atlantique et du syndicat mixte d'études de Notre-Dame-des-Landes, invite Angers à fermer son aéroport.
Le tollé est immédiat en Anjou. Le président d'Angers Loire Métropole, Jean-Claude Antonini, lui-même ancien président du syndicat mixte, ne décolère pas.

1 million d'euros par an justifié pour Angers - Certes, le trafic y est modeste : en dépit d'une croissance de 25 % en 2011, la plate-forme n'a enregistré que 5 300 passagers. La facture globale annuelle à la charge de la collectivité s'élève à 1 million d'euros.

Mais pour Daniel Loiseau, vice-président de la communauté d'agglomération, elle se justifie. « Nantes fait depuis longtemps la course aux chiffres et tout développement d'un tiers dans sa périphérie est considéré comme un frein au sien. Mais nous devons conserver ce type d'équipement dans des conditions optimales d'exploitation pour le loisir, les urgences sanitaires, l'aviation d'affaires et le tourisme. »

Deux vols réguliers vers Londres et Nice sont aujourd'hui proposés, d'autres sont à l'étude. « Notre créneau est plus modeste que Notre-Dame-des-Landes, qui vise un maximum de liaisons vers les capitales européennes, il y a complémentarité », assure Daniel Loiseau.

Pas un mot sur les aéroports bretons - Pas un mot en revanche sur les aéroports bretons, en particulier les deux leaders, Brest et Rennes. En croissance depuis 2005, celui de la cité du Ponant franchira cette année la barre du million de passagers.
Le terminal, mis en service en 2007, peut accueillir jusqu'à 1,8 million de voyageurs.
Quant à celui de Rennes, situé à 80 kilomètres de Notre-Dame-des-Landes, il a totalisé l'an passé 434 000 passagers, en hausse de 5,3 %, et sa progression sera sans doute encore plus forte cette année.

Avec les atouts et les handicaps que lui confère sa position géographique, et un brin de défiance à l'égard de la capitale bretonne, Brest a toujours fait de ses « conditions d'accessibilité » une priorité, notamment à l'international.
Et sa plate-forme n'a pas grand chose à craindre de la concurrence future du TGV qui laissera Paris à 3 h 30.

De leur côté, si Rennes et Nantes ne cessent depuis plusieurs années de renforcer leurs coopérations, la rivalité entre les deux préfectures demeure et toute infrastructure susceptible de consolider leur rang métropolitain est bonne à prendre.

La liaison ferroviaire rapide prévue entre Nantes et Rennes via Notre-Dame-des-Landes pourrait changer cet état d'esprit mais son calendrier de réalisation, à l'horizon 2035-2040 dans le meilleur des cas, en fait encore un serpent de mer.

Histoire et composition du syndicat mixte - L'histoire et la composition du syndicat mixte de Notre-Dame-des-Landes traduisent ces rapports de force. Ni Brest ni le conseil général du Finistère n'en sont membres au contraire de Rennes Métropole et de l'Ille-et-Vilaine, présents depuis 2002.

Mais, même entre élus bretons, l'affaire n'est pas simple. Au milieu des années 1990, Edmond Hervé, maire socialiste de Rennes, et le centriste Pierre Méhaignerie, président du conseil général d'Ille-et-Vilaine, s'opposent, le premier reprochant au second de favoriser les intérêts de Nantes et des Pays de la Loire en soutenant Notre-Dame-des-Landes.

Donnant-donnant entre les deux régions - Quant à la participation financière de la Bretagne (29 millions d'euros) à la réalisation de l'aéroport, elle ne fut votée en octobre 2010 que par 47 des 83 élus, la délibération allant jusqu'à diviser la majorité socialiste.
Il s'agit d'ailleurs à l'époque d'un donnant-donnant entre les deux régions, les Pays de la Loire s'engageant à hauteur de 100 millions d'euros pour la LGV Ouest dont les gains de temps profiteront d'abord à la Bretagne.

Pendant ce temps, au sud des Pays de la Loire, la Vendée s'inquiète du transfert de l'aéroport nantais au nord de l'agglomération, d'autant qu'aucun nouveau franchissement de la Loire n'est envisagé malgré un périphérique très embouteillé.

Nantes Atlantique pour Airbus - Le maintien, quasi-probable, de la piste de Nantes Atlantique pour les besoins de l'usine Airbus, et ce malgré l'engagement contraire de Jean-Marc Ayrault en 2009, fragilise encore un peu plus le modèle théorique de Notre-Dame-des-Landes puisque, de fait, il faudra doubler les équipements.

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