De nouveaux soutiens pour la création d'une dotation additionnelle climat pour permettre aux collectivités locales de financer leurs politiques climatiques et de transition énergétique. Élargissons encore la mobilisation pour obtenir la création de cette nouvelle ressource avant la fin de l'année.
Merci aux signataires pour ce relais.

Tribune au nom du réseau Territoires à énergie positive parue dans lemonde.fr

 « Réinventer l’énergie ». C’est ce à quoi nous invite très justement le colloque du Syndicat des énergies renouvelables qui rassemble, le 4 février, les principales entreprises du secteur. Mais pour réinventer l’énergie, il faut commencer par réinventer sa gouvernance. Peut-on compter uniquement sur les grands opérateurs, EDF, Engie, Total... pour cela ? Intuitivement, on peut douter que ces acteurs de la centralisation énergétique se mettent réellement au service d’un objectif 100 % renouvelable en ligne avec les engagements de la COP21. A contrario, la transition énergétique ne pourra vraiment s’accélérer qu’à travers la mobilisation des territoires, où, déjà, les actions concrètes se multiplient et s’amplifient au plus près des citoyens, des entreprises et de leurs besoins énergétiques.

C’est ainsi qu’en France, le CLER, Réseau pour la transition énergétique, a introduit en 2010 le concept de territoires à énergie positive. Un an plus tard, des territoires s’associaient au sein du réseau Tepos pour promouvoir la vision d’un futur 100 % renouvelable, dans une approche de développement local. Rapidement, le ralliement de grandes régions comme l’Aquitaine, Rhône-Alpes et la Bourgogne ont renforcé l’ampleur du mouvement. Parallèlement, le CLER, avec l’appui de la Commission européenne, lui donnait une dimension européenne par la coopération entre les Tepos et les territoires 100 % renouvelables de neuf autres pays de l’Union.

Récemment, à l’initiative de Ségolène Royal, le ministère de l’écologie est venu compléter le puzzle, avec son appel à projets « Territoires à énergie positive pour la croissance verte » (TEPCV), dont les aides financières sont évidemment très appréciées des 212 collectivités lauréates. Mais en ces temps de baisse des dotations générales de fonctionnement des collectivités, il est permis de s’interroger sur les intentions de l’Etat.

Irrigation goutte à goutte

Le risque est grand que l’appel à projet ministériel TEPCV ne soit qu’une oasis financière dans le grand désert de la rigueur budgétaire, voire qu’il ne soit bientôt plus qu’un lointain mirage. Ce dont les territoires ont besoin, c’est plutôt d’une irrigation au goutte à goutte, mieux maîtrisée et surtout pérennisée. Le sénateur Ronan Dantec propose ainsi d’attribuer aux collectivités locales une dotation générale de fonctionnement « énergie-climat » complémentaire, pour leur permettre d’exercer efficacement les responsabilités que l’Etat leur confie avec les plans climat-air-énergie territoriaux qui seront généralisés à l’ensemble du territoire dès 2017.

Une telle mesure permettrait à la fois à l’Etat de maîtriser ses dépenses et d’assurer son rôle légitime de régulateur et de stratège, et aux territoires de renforcer leurs capacités d’investissement dans des projets verts en toute autonomie décisionnelle. Il en résultera rapidement des projets aboutis, structurés, qui généreront alors des retombées financières et économiques pour les territoires (revenus, recettes fiscales, emplois etc.) aptes à enclencher un cercle vertueux.

De même, la multiplication des programmes nationaux réservés aux TEPCV (convecteurs électriques et lampes LED pour EDF, passeport de la rénovation énergétique pour Engie), proposés par les énergéticiens et promus par le ministère, pose question : les grands groupes ne seront-ils pas tentés d’utiliser le dispositif ministériel comme un cheval de Troie pour imposer leurs solutions ? Les territoires n’ont pas vocation à assurer le service après-vente d’actions standardisées, plus ou moins pertinentes, conçues à Paris par les opérateurs historiques. Pour un territoire, l’autonomie énergétique consiste plutôt à accroître son efficacité énergétique et sa production renouvelable en construisant des projets de transition avec et au bénéfice des acteurs locaux et de la population.

Des fonds sous-consommés

Les retours d’expérience du réseau Tepos montrent que le levier le plus efficace pour donner vie à de tels projets est de créer, au cœur des territoires, des postes d’animateurs de la transition afin de généraliser l’« intelligence territoriale » indispensable pour apprivoiser la triple complexité technique, juridique et financière des projets énergétiques, et ainsi transformer les contraintes énergétiques en opportunités. Par exemple, des fonds conséquents sont aujourd’hui disponibles dans les institutions financières publiques, telle la Caisse des dépôts, mais trop souvent personne ne sait comment ouvrir le robinet dans les territoires, si bien que ces fonds sont aujourd’hui sous-consommés. C’est pourquoi l’Etat et les régions doivent donner aux territoires les moyens de se doter d’une solide « équipe énergie », apte à accompagner les forces vives dans la mise en œuvre de projets énergétiques structurants et partagés, créant un effet d’entraînement auprès de la population.

La France des territoires est prête à s’engager dans la transition énergétique. Des collectivités locales pionnières ont montré le chemin, dans le Thouarsais, le Mené, ou encore à Loos-en-Gohelle. Un nombre croissant d’élus, d’entreprises, d’agriculteurs et de citoyens se mobilisent en faveur d’un avenir 100 % renouvelable. Ils sont accompagnés par des réseaux associatifs par le biais desquels se partagent les expériences, s’acquièrent les compétences et se construit chaque jour la volonté tenace d’avancer. Bienvenue à tous ceux qui souhaitent amplifier ce mouvement.

Au nom du réseau Territoires à énergie positive :
Jacky Aignel, maire de la commune nouvelle du Mené
Bernard Blaimont, président de la communauté de communes des Crêtes Préardennaises
Michel Feyrit, Président du Syndicat mixte interterritorial du Pays du Haut Entre deux Mers (Siphem)
Michel Maya, maire de Tramayes et président du CLER

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