Intervention de Ronan Dantec sur la proposition de résolution visant à affirmer le rôle déterminant des territoires pour la réussite d'un accord mondial ambitieux sur le climat (rapporteur : Jérôme Bignon)

M. le Président, mme la Ministre, m. le Rapporteur, mes chers collègues, sachant que vous avez été très nombreux à travailler sur cette proposition de résolution,

Je devais, dans ces quelques minutes, souligner plusieurs points clefs de cette résolution, que le groupe écologiste soutient pleinement.

Je voulais notamment remercier le rapporteur Jérôme Bignon, pour nous avoir proposé un texte qui dit clairement notre opposition collective à la poursuite des subventions aux énergies fossiles en France, symbole fort alors que ce sont toujours 10 millions de dollars par minute qui sont investis de par le monde, dans ces choix énergétiques, du charbon et du pétrole, investissements qui sont en train de priver d’avenir les jeunes générations de notre planète.

Je voulais aussi rappeler les mentions, dans cette résolution, sur le rôle des collectivités territoriales, et il était important que le Sénat réaffirme que, sans cette approche territoriale, il est totalement impossible d’atteindre les objectifs mondiaux de résolution des émissions de gaz à effet de serre.

C’était le message du Sommet mondial Climat et Territoires, soutenu par nombre des principaux acteurs non-étatiques mondiaux, et en tant que coprésident de ce Sommet, je ne peux que me féliciter que notre message soit ici renforcé.

Mais depuis vendredi soir, recevoir la Conférence climat à Paris a pris d’autres dimensions.

Je voudrais ici, comme d’autres avant moi, m’incliner devant les victimes de la barbarie, souvent de jeunes adultes, de jeunes parents. Nous leur devons de mettre toute notre énergie pour bâtir un monde apaisé, un monde de sécurité où l’avenir est ouvert à tous.

La protection des personnes ne pourra jamais être garantie seulement par des lois de sécurité, aussi justifiées soient-elles. Sans action résolue sur toutes les causes des désagrégations sociales qui sont le terreau du terrorisme et de la barbarie, alors nous ne pourrons y arriver.

J’ai déjà eu l’occasion de rappeler dans cet hémicycle qu’il était impossible d’expliquer l’émergence de Boko Haram sans les sécheresses et les migrations autour du lac Tchad, c’est une situation parfaitement documentée, et décrite dans ces mécanismes.

On ne peut pas perdre de vue non plus les sécheresses à répétition en Syrie, qui ont provoqué un exode rural massif, fragilisant la société syrienne. On parle d’un million de personnes déplacées ces dernières années.

Aussi redisons-le ici une nouvelle fois : sans accord ambitieux à Paris, crédibilisant un scenario de stabilisation du climat sous les 2°C, il est totalement illusoire de penser que nous pourrons construire au XXIème siècle un monde de paix, quels que soient les moyens militaires déployés. Le monde du dérèglement climatique est bien un monde de migrations massives et de foyers terroristes, soyons-en parfaitement conscients.

La COP21 peut être l’occasion pour le monde civilisé, à travers ses dirigeants, de venir témoigner de son soutien à notre pays meurtri. Mais, s’ils ont pris la totale mesure de ce qui se passe aujourd’hui dans le monde, alors ils viendront d’abord à Paris avec des propositions réévaluées de réduction des émissions de gaz à effet de serre, avec des engagements de financement crédibles pour accompagner le développement, l’accès à l’énergie et l’éducation.

Car redisons-le avec force, c’est bien le sous-développement et la faiblesse des systèmes éducatifs qui sont le terreau de l’obscurantisme, de ces sentiments d’injustice que des forces terroristes manipulent au service de leur fanatisme barbare.

Sur cette question du financement, nous ne pouvons d’ailleurs être que déçus et inquiets des très faibles avancées du G20, qui augurent mal des négociations de la COP sur ce point. Or, sans crédibilité des propositions des pays riches sur le financement du développement et de l’adaptation, il y a un vrai risque d’absence d’accord à Paris.

Répondre aux enjeux climatiques n’est possible sans s’appuyer sur les dynamiques des acteurs non-étatiques, associations, entreprises, collectivités, etc. C’était l’une des forces de cette COP21 à travers l’agenda des solutions, le Lima-Paris Action Agenda, de rappeler que l’action concrète est le socle de la réponse au défi climatique.

Nous sommes, je vous l’avoue, inquiets concernant le maintien à Paris de cette dynamique. Nous comprenons, Mme la Ministre, les impératifs de sécurité qui s’imposent aujourd’hui aux autorités françaises. Mais cela ne doit pas empêcher que s’expriment ces volontés d’actions. Nous sommes à votre disposition, Mme la Ministre, pour étudier avec vous le bon équilibre.

Ce soir, la Tour Eiffel scintille en bleu-blanc-rouge. Dans quelques jours, elle sera à nouveau aux couleurs de la COP et de la défense du climat, notre précieux bien commun. On la représente aujourd’hui comme un phare dans la nuit de l’obscurantisme. Demain, alimentée en énergies renouvelables, elle devra éclairer la voie pour un monde stoppant le dérèglement climatique et stabilisant par là-même un XXIème siècle qui ne doit pas se résoudre au tragique, et dire que coopération et responsabilités individuelles et collectives sont nos moteurs pour donner son sens à ce si beau mot de fraternité.

Je vous remercie.

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