Climat : les sénateurs R. Dantec et M. Delebarre en faveur d’un accès direct des collectivités aux fonds internationaux
Les sénateurs Ronan Dantec (EELV) et Michel Delebarre (PS) remettent mardi 17 septembre 2013 leur rapport de mission, intitulé « Les collectivités territoriales dans la perspective de Paris 2015 : de l’acteur local au facilitateur global » à Pascal Canfin, ministre délégué chargé du Développement. Dans ce rapport les deux sénateurs plaident en faveur d’un accès direct des collectivités territoriales aux fonds internationaux (Fonds vert et Fonds d’adaptation, mécanismes de flexibilité tels que la MOC et le MDP), et d’un renforcement des coopérations décentralisées. Le rapport se divise en trente propositions regroupées en trois axes : renforcer la capacité des collectivités territoriales à réduire leurs émissions de GES, mobiliser la société civile française et faire des collectivités un véritable acteur des négociations climatiques, en vue de la conférence des parties qui doit se tenir à Paris en décembre 2015 et aboutir à un accord mondial pour l’après-2020 AEF n°14719).
Le rapport « Les collectivités territoriales dans la perspective de Paris 2015 : de l’acteur local au facilitateur global », remis mardi 17 septembre au ministre délégué chargé du Développement Pascal Canfin, est le fruit de l’audition de plus de trente experts et de trois cents réponses de collectivités territoriales à un questionnaire soumis par les sénateurs Ronan Dantec (EELV) et Michel Delebarre (PS).
En trente propositions, il détaille le triple rôle que peuvent incarner les collectivités locales lors des négociations climatiques internationales, selon une logique de renforcement et de « rééquilibrage entre top-down (du haut vers le bas, engagements des États se déclinant sur les acteurs nationaux) et bottom-up (du bas vers le haut, définition des objectifs fondée sur les dynamiques concrètes des acteurs) ». « A ma connaissance, c’est la première fois qu’à deux ans d’une conférence des parties à la convention climat, un État prend l’initiative de demander une mission parlementaire sur le rôle des collectivités », explique à AEF le sénateur Ronan Dantec, par ailleurs porte-parole du réseau mondial de collectivités CGLU (Cités et gouvernements locaux unis), soulignant qu’une négociation sur le climat est aussi une dynamique entre acteurs non étatiques.
SOUTENIR L’ACTION DES COLLECTIVITÉS PAR LE FINANCEMENT
« L’action des territoires est, à l’échelle mondiale, la plus grosse capacité de réduction des gaz à effet de serre », poursuit Ronan Dantec. Selon le rapport, les fonds européens sont une opportunité de financement pour les collectivités. Le texte propose d’engager « rapidement » une réflexion sur la synergie entre les fonds européens et les SRCAE, ainsi que sur la mobilisation du Feder (Fonds européen de développement régional). Une mutualisation au niveau européen des expériences de projets « climat » et des échanges internationaux est également encouragée. Ce soutien passe aussi par un engagement en faveur de la remontée du prix de la tonne CO2 sur le marché du carbone, en réaffirmant les objectifs pour 2030 de réduction des émissions de GES.
« Dans le cadre des négociations climat, on propose de faciliter l’accès aux collectivités des mécanismes internationaux MOC et MDP et adopter une position ouverte sur les comptabilités entre les marchés carbone domestiques, comme ceux du Québec, de la Californie ou en Chine », explique Ronan Dantec. Les deux mécanismes MOC et MDP ont été créés par les accords de Marrakech de 2001. Ils constituent, pour un pays du nord, à investir dans un projet de réduction d’émissions dans un pays du sud (MDP) ou dans un autre pays du nord (MOC) pour obtenir en échange des crédits d’émissions. Pour les villes et territoires des pays en développement, les deux sénateurs proposent de défendre des mécanismes d’accès direct aux mécanismes de financement du Fonds vert et du Fonds d’adaptation. Le rapport souligne également la possibilité d’affecter des financements assis sur le produit de la taxe ou de la redevance « déchet », à hauteur de 1 % aux collectivités.
LES COLLECTIVITÉS, ACTEURS DES NÉGOCIATIONS CLIMAT
Ronan Dantec et Michel Delebarre plaident en outre pour une convergence des agendas climat-développement : « Il n’y aura pas d’accord à Paris si il n’y a pas d’accord pour les OMD post-2015 », assure le sénateur de Loire-Atlantique. « Les propositions des collectivités territoriales peuvent être soutenues par le biais d’un calendrier distinct de celui des négociations internationales, à l’initiative de la France », souligne le rapport. La première étape pour les mois prochains sera le Sommet mondial des villes et territoires, le 28 septembre à Nantes, où sera présentée la feuille de route des réseaux internationaux des collectivités jusqu’à Paris 2015. Les collectivités territoriales seront également présentes à la 19e conférence des parties à la Ccnucc, qui se tiendra à Varsovie au mois de novembre. D’autres événements sont prévus, courant 2014, notamment en marge de l’Assemblée générale des Nations unies à New-York sous l’égide de Ban Ki-moon et du Sommet mondial des régions. « Ce calendrier peut faire pression sur les États, et permet de faire des propositions pour mieux intégrer les collectivités aux négociations et dépasser des blocages entre États », estime Ronan Dantec.
La création d’un groupe des États « amis des collectivités » aux négociations climat de 2015 est également soutenue. Il pourrait réunir une partie du groupe Afrique, notamment le Sénégal, le Mexique, la Corée, la Suisse et la France. Enfin selon le rapport, les collectivités peuvent incarner le rôle de « facteur », en faisant véhiculer des messages, en s’appuyant sur le réseau de la francophonie et des coopérations décentralisées. A cet effet, le rapport propose la création d’un pavillon des collectivités territoriales mondiales sur le site du Bourget, qui accueillera la COP 21. « Nous ne sommes plus dans un cycle de reconnaissance des collectivités territoriales », appuie Ronan Dantec. « Nous sommes dans une logique de dynamique d’acteurs clés et nous pouvons nous imaginer comme un acteur au service d’un accord ambitieux. »
Soulignant le « climatofatalisme » de la société française, le rapport milite enfin pour une mobilisation de la société civile et des élus locaux, dans le but de montrer que les collectivités peuvent réduire les émissions de GES tout en créant des bénéfices. Cette mobilisation pourrait notamment passer par une formation, mise en place par l’Ademe, des élus sur les enjeux climat et la conduite des politiques climatiques territoriales.