La proposition de loi sur les conséquences environnementales des essais nucléaires en polynésie française est une résilience politique pour la gauche française

Polynésie: vifs débats en vue sur la rétrocession des atolls du nucléaire

(©AFP / 17 janvier 2012 16h33)

PARIS – Le Sénat examine mercredi un texte porté par la gauche sur les conséquences environnementales des essais nucléaires en Polynésie, sujet encore ultrasensible dans cette collectivité d’outre-mer et qui promet des débats tranchés avec la droite, notamment sur le thème du secret défense.

C’est une loi qui montre que l’on s’occupe des Polynésiens et de leurs souffrances, a déclaré le sénateur polynésien Richard Tuheiava (app. PS), lors de la présentation mardi de sa proposition de loi.

La principale disposition est la rétrocession par l’Etat à la Polynésie, le 1er janvier 2014, des atolls de Mururoa et Fangataufa, où ont été réalisées des tirs atmosphériques et sous-terrains entre 1966 et 1995.

Avec comme corollaire important que ce soit à +l’agresseur+ (L’Etat, ndlr) de poursuivre l’entretien et la surveillance des lieux, a détaillé M. Tuheiava, pour qui la rétrocession doit permettre de mener des études sur ces atolls, avec davantage de transparence.

Il est important que ce débat soit posé au moment où on parle de projet de société dans le cadre de la campagne électorale, a insisté le jeune sénateur de 37 ans, espérant une adoption définitive du texte après un changement de majorité à l’Assemblée en juin.

En attendant, même son adoption mercredi reste incertaine: le texte, soutenu par la majorité PS, EELV, Radicaux de gauche et communistes, a droit à deux heures de débats dans le cadre d’une niche socialiste.

Et l’opposition de droite a déjà déposé sept amendements de suppression des sept articles, a fait remarquer son rapporteur Roland Courteau (PS), y voyant une obstruction inacceptable pour empêcher d’arriver au vote.

Le gouvernement s’y oppose, arguant de la sécurité des matières radioactives et pour éviter la diffusion d’informations confidentielles sur la composition de la bombe atomique made in France, a-t-il ajouté.

Les débats seront suivis à la loupe en Polynésie où son président indépendantiste Oscar Temaru a appelé la population à descendre dans la rue si la France refusait cette rétrocession.

Le texte doit réparer une omission législative, la loi Morin de 2010 n’abordant que l’aspect sanitaire des essais nucléaires, a souligné M. Tuheiava, lors d’une conférence de presse qui s’est ouverte par une prière d’un opposant historique aux essais en Polynésie, John Doom, un geste traditionnel dans l’archipel mais inédit au Parlement.

Régler la question sanitaire sans régler la question environnementale est déjà étrange dans la mentalité occidentale, mais pour les autochtones, dissocier à ce point l’individu de son environnement naturel, ça ne passera jamais, a-t-il insisté.

Le texte porte aussi sur la sécurité des populations voisines qui sont en danger, un danger avéré (radioactivité des dépôts de plutonium) et un danger prévisible, comme l’affaissement du platier de Mururoa qui pourrait en cas d’effrondrement générer un tsunami, selon M. Tuheiava, qui a insisté sur la nécessité d’un système d’alerte.

Sur les 5.048 victimes d’essais nucléaires répertoriées en Polynésie, 637 ont pu faire l’objet d’un dossier correspondant aux critères de la loi Morin et 2 personnes ont été indemnisées à ce jour par l’Etat.

Ronan Dantec (EELV) a souligné la part symbolique très forte que représente pour les Polynésiens la restitution des atolls, qui permettrait une confrontation d’expertises. Ce sénateur a aussi mis l’accent sur le travail en commun avec le PS sur ce texte, sorte de résilience politique. Une allusion à l’affaire du Rainbow Warrior, du nom du navire de Greenpeace en route pour Mururoa que le gouvernement socialiste avait fait couler en 1985 à Auckland.

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