Intervention de Ronan Dantec au nom du groupe écologiste dans la discussion générale sur le projet de loi adopté par l'Assemblée Nationale après engagement de la procédure accélérée, relatif à la transition énergétique pour la croissance verte en nouvelle lecture.

Mme la Présidente, Mme la Ministre,MM. les RapporteursMes chers collègues,

Cette loi est une loi importante qui organise enfin en France une transition énergétique urgente, dans un pays qui a trop longtemps délégué ses stratégies énergétiques à quelques-uns, en–dehors de tout débat collectif et démocratique. Cela fait plusieurs années que nous vivons avec ce débat, du débat national aux différentes lectures parlementaires, et nous en oublierions presque que c'est quand même la première fois que le Parlement débat vraiment du fond des questions énergétiques. Même en 1981, sous François Mitterrand, le débat promis avait été escamoté et s'était transformé en une seule demi-journée de débat au Parlement.

Le système énergétique français n'est pas durable :

  • déficit très important de la balance extérieure, en importation de produits pétroliers notamment;
  • des émissions de CO2 qui baissent très lentement, à cause du développement particulièrement fort en France du transport routier, le chapitre mobilité est d'ailleurs un chapitre majeur de ce projet de loi ;
  • un système électrique dans une impasse, avec une filière nucléaire en quasi-faillite ; et un grand opérateur historique qui a perdu cette année 4 milliards, c'est ce que nous a dit son président lors de son audition par le groupe énergie.

Donc il y avait urgence, et notre responsabilité parlementaire était donc de nous lancer dans ce débat, lucidement et sans tabou.

Cela n'aura malheureusement pas été tout à fait le cas. Je reste, je vous l'avoue, toujours interrogatif, sur les présupposés politiques qui empêchent un débat sérieux sur le sujet, une sorte de « nucléo-déisme », nourri d'intérêts immédiats ou d'une certaine idée d'une France aussi éternelle et irradiante qu'une barre de plutonium.

« Touche pas à ma centrale » reste donc le slogan du Sénat, et je m'en désole. Donc, une nouvelle fois, en commission, vous avez enlevé la date de 2025 pour la réduction à 50% de la part du nucléaire et tenté de retarder le débranchement de la première centrale en fin de vie, grand tabou du lobby qui craint plus que tout qu'à partir du moment où on commence à éteindre les centrales, on y prenne goût...et je reconnais qu'il n'a pas tout à fait tort.

Tout cela est un peu de la posture sans grand conséquence, surtout en nouvelle lecture après CMP, mais ce choix d'opposition systématique sur la question du nucléaire n'aura pas permis au Sénat d'avoir de l'influence sur l'ensemble du débat.

Sur d'autres chapitres, nous avons souvent plutôt bien travaillé avec les rapporteurs, que je salue, et avec vos services, Mme la Ministre, que je remercie, et le maintien par l'Assemblée nationale de nombre de ces amendements le montre.

Cela avait été le cas notamment sur les chapitres liés à la rénovation, aux déchets, où nous avons fait œuvre utile, je rappelle notamment la filière REP sur les bateaux de plaisance, sur laquelle nous avons encore amélioré le dispositif. Je regrette toutefois les reculs en commission sur les obligations de rénovation sur lesquelles la commission a fait rimer immobilier avec immobilisme.

Je serai plus prudent sur le développement du renouvelable, notamment de l'éolien terrestre, où une certaine hostilité s'exprime régulièrement dans cet hémicycle, où les amendements adoptés ici ont laissé quelques traces dans la navette. Je crois que nous avons à rassurer les opérateurs qui soulignent encore quelques insécurités juridiques et arcanes administratives inutiles.

Je voudrais juste souligner quelques avancées de cette dernière lecture, qui mériteraient d'être conservées en dernière lecture à l'Assemblée.

Nous avons par exemple compléter l'accès aux données pétrolières pour la réalisation des plans climat énergie territoriaux et, surtout, nous avons intégré, dans cette nouvelle version, l'augmentation progressive de la Contribution Climat Energie, qui restait bloquée jusqu'à présent à 2016.

C'est un point d'accord entre pro-nucléaires et écologistes, c'est dire le niveau de consensus, il serait dommage de ne pas le respecter.

La loi sera bientôt adoptée, je voudrais en conclusion, Mme la Ministre, insister sur deux points, qui font écho à votre discours d'introduction.

Premièrement, c'est bien maintenant la rapidité de mise en œuvre de cette loi qui doit nous mobiliser. Ce sera en particulier la responsabilité des territoires. Je crois qu'ils sont prêts à s'engager, c'est ce qu'ils ont affirmé à Lyon la semaine dernière au niveau mondial, nous avons eu le plaisir de vous y accueillir, Mme la Ministre, avec le Président de la République. C'est bien par les territoires que va passer la transition énergétique. Cette loi porte des avancées majeures sur la mobilisation des territoires et sur l'articulation entre les différentes échelles de gouvernance, je tenais à le rappeler.

Ensuite, je voudrais rappeler que la PPE (Programmation Pluriannuelle de l'Energie) en discussion devra traduire cette volonté, ce sera le moment de vérité. A un moment, il va bien falloir dire quel sera le niveau de la puissance nucléaire installée en 2023, et montrer ainsi le caractère inéluctable de cette transition énergétique, qui doit rester l'une des grandes œuvres de ce quinquennat.

Je vous remercie

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