Dans le cadre de l’examen du projet de loi de finances pour 2021, Ronan Dantec est intervenu en tant que chef de file pour le groupe Ecologiste - Solidarité et Territoires (GEST) sur la mission « Cohésion des territoires ». Le groupe a déposé trois amendements qui ont été rejetés par la majorité sénatoriale : un pour financer l'accompagnement social dans le cadre du plan quinquennal pour le Logement d'abord puis pour renforcer concrètement les capacités d'accueil des centres d'hébergement pour les femmes victimes de violences et enfin pour augmenter les moyens financiers et humains de l'Agence nationale de la cohésion des territoires.

Le Sénat a adopté les crédits de la mission « Cohésion des territoires » alors que le groupe a considéré que l'effort budgétaire fourni par le gouvernement en la matière n'est pas à la hauteur des enjeux.

M. Ronan Dantec. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, depuis le début de la pandémie, une nouvelle population a basculé dans la précarité, avec près d’un million de personnes supplémentaires en grande difficulté.

Cette crise implique donc un renforcement en urgence de plusieurs dispositifs de politique publique pour soutenir les plus fragiles, en intégrant ces nouveaux publics, étudiants, commerçants et entrepreneurs individuels, qui ont basculé dans la précarité.

Il se trouve, madame la ministre, que nous nous sommes réunis à Nantes pour discuter de ces sujets. Les témoignages qui remontent des associations sont extrêmement inquiétants à cet égard.

Dans ce contexte, la mission « Cohésion des territoires », qui regroupe l’action publique en matière d’hébergement, de parcours vers le logement et d’insertion des personnes vulnérables ou d’amélioration de l’habitat, est un axe fort du projet de loi de finances et mérite une attention toute particulière.

Or l’effort budgétaire fourni par le Gouvernement ne nous semble pas à la hauteur de nombre de ces enjeux.

Tout d’abord, la politique du logement a été mise à mal ces dernières années. Les crédits des APL ont fortement diminué depuis 2017, alors que l’accès au logement implique que l’on prenne des mesures très fortes. Nous avons donc déposé une série d’amendements tendant à financer l’accompagnement social dans le cadre du plan quinquennal pour le Logement d’abord, ou à renforcer concrètement – c’est une demande précise – les capacités d’accueil des centres d’hébergement pour les femmes victimes de violences. Avec le confinement, nous le savons, les violences conjugales ont en effet beaucoup augmenté.

Sur la rénovation énergétique des bâtiments, la promesse de 500 000 logements rénovés par an n’est pas tenue, tant s’en faut. Le Gouvernement a décidé d’élargir le dispositif MaPrimeRénov’, mais y accéder reste encore complexe. De plus, la couverture des travaux est trop partielle pour en permettre la généralisation.

Dans un rapport publié la semaine dernière, le Haut Conseil pour le climat constate un retard de la France par rapport à ses voisins européens dans ce domaine pourtant indispensable à la transition écologique. Il recommande notamment de mieux dépenser l’argent public et de le flécher vers des rénovations en profondeur. Nous espérons qu’au printemps prochain la loi Climat répondra enfin à cet enjeu majeur, notamment en imposant une obligation de rénovation. Mais les dispositifs actuels, malgré les hausses budgétaires, ne suffiront pas – nous le savons déjà.

Le programme 112, « Impulsion et coordination de la politique d’aménagement du territoire », comporte, avec le plan de relance, les crédits destinés au financement des outils de contractualisation entre l’État et les collectivités territoriales, dont les fameux nouveaux contrats de relance et de transition écologique, qui restent encore assez mal définis. J’ai d’ailleurs trouvé notre collègue Bernard Delcros très optimiste sur ce point. Il a peut-être des informations dont je ne dispose pas. En ce qui me concerne, j’ai eu l’occasion d’interroger la ministre sur le sujet, et nous n’avons pas encore une idée précise de ces contrats.

Il s’agit en tout cas du troisième dispositif en cinq ans pour conduire la transition écologique territoriale, après les programmes Territoires à énergie positive, ou les contrats de transition écologique (CTE). Les collectivités ont besoin de stabilité et de visibilité. Il aurait suffi de contractualiser sur le fondement du plan climat-air-énergie territorial (PCAET), compétence obligatoire des intercommunalités depuis la loi NOTRe et la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte. Il est à croire que nous aimons créer sans cesse de nouveaux dispositifs, mais Mme Wargon et moi-même avons déjà eu l’occasion d’en parler. (Sourires.)

On trouve dans ce même programme 112 les crédits de l’Agence nationale de la cohésion des territoires, qui a maintenant un an d’existence. En tant que guichet unique chargé de l’accompagnement en ingénierie des élus, notamment pour le déploiement de différents programmes nationaux, l’Agence demande évidemment des moyens humains importants.

De plus, cinq conventions partenariales avec les cinq partenaires privilégiés que sont l’Agence de la transition écologique, l’ANRU, le Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement (Cerema), la Banque des territoires, et l’ANAH ont été approuvées. Ces conventions permettront d’apporter aux territoires une offre de services qualifiée.

En parallèle, les dépenses d’ingénierie de l’Agence ont augmenté de 10 millions d’euros : c’est un bon début, mais, parallèlement, les effectifs des opérateurs partenaires sont en forte baisse – c’est en quelque sorte un jeu de vases communicants.

Pour déployer le plan de relance sur le terrain, le compte n’y est donc pas. Il importe de donner à l’ANCT des moyens humains et budgétaires à la hauteur des enjeux auxquels la population et les collectivités territoriales sont confrontées, à la hauteur de leurs attentes. Nous avons donc déposé un amendement ayant pour objet de les augmenter.

Concernant la politique de la ville, nous devons aussi amplifier nos actions en faveur de l’emploi, de l’éducation prioritaire et du renouvellement urbain, comme l’a dit Marie-Noëlle Lienemann. Sur ce dernier point, la dotation de l’État est en deçà de la trajectoire annoncée et les incertitudes liées à l’avenir du groupe Action Logement, financeur majeur, font peser de vraies craintes sur l’avenir.

Je n’ai pas l’habitude de citer le rapporteur Dallier dans le texte tous les jours (Sourires.),...

M. Philippe Dallier. Tout arrive !

M. Rémy Pointereau. Vous avez tort de ne pas le faire plus souvent !

M. Ronan Dantec. ... mais je crois qu’il disait que nous allions vers une crise du logement sans précédent, ce qui est un excellent résumé de la situation.

M. Mathieu Darnaud. N’oubliez pas les droits d’auteur ! (Sourires.)

M. Ronan Dantec. Globalement, le budget de la mission « Cohésion des territoires » reste encore très timoré même si, sur certains projets comme le numérique, il y a effectivement un vrai effort. Vous l’aurez sans doute compris, le groupe Écologiste–Solidarité et Territoires ne votera pas la totalité de ces crédits. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)

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