En tant que chef de file pour le groupe Ecologiste-Solidarité et Territoires, Ronan Dantec est intervenu sur la Proposition de loi visant à faciliter la mise en œuvre des objectifs de « zéro artificialisation nette » au cœur des territoires. Il rappelle que le rapport de compatibilité dans le fascicule réglementaire entre SRADDET, SCoT et PLU ne peut être remis en cause et que si les projets d’envergure nationale doivent intégrer un compte spécial, ils ne pourront néanmoins être passés par pertes et profit.
Mme la Présidente, M. le Ministre, Mme la Présidente de la commission spéciale, M. le Rapporteur
Cela a déjà été souligné, le rythme d’artificialisation de nos espaces naturels, agricoles et forestiers est absolument insupportable. Il remet en cause notre autonomie alimentaire, la biodiversité de nos territoires, nos capacités de stockage du carbone…
C’est fort de ce constat que la convention citoyenne pour le climat avait fait de l’objectif du « zéro artificialisation nette », une de ces propositions les plus fortes.
Nous le savons, l’engagement du Président de la République de reprendre sans filtre les propositions de la convention n’a pas été tenu (et vraiment pas tenu) engendrant une immense déception de la part des 150 citoyens tirés au sort. Néanmoins, une mesure forte est passée à travers les mailles d’un tamis politique et technocratique pourtant particulièrement serré, et cette mesure, c’est l’objectif du « zéro artificialisation nette » en 2050, inscrit dans la loi Climat et résilience de Barbara Pompili.
Cet objectif est ambitieux, car il rompt avec bien des logiques de développement, d’une course à l’installation de surfaces commerciales et aux nouveaux habitants, dont les conséquences sont particulièrement visibles dans nos territoires, entre lotissements s’étalant dans les périphéries de bourg et zones commerciales de nos entrées de villes.
Il est juste de dire, qu’avant même la loi ZAN, une prise de conscience était déjà à l’œuvre sur le caractère intenable de ce modèle de développement, sur la nécessité de réduire la consommation des ENAF. Déjà, dans bien des territoires, la taille des jardins des lotissements, par exemple, s’était fortement réduite ; et l’exigence d’une densification urbaine intelligente s’imposait dans les cahiers des charges de toute nouvelle ZAC.
Cette loi ZAN a le mérite d’accélérer le rythme pour atteindre les objectifs que nous nous sommes collectivement fixés, et nous la soutenons donc clairement.
Elle a, c’est vrai, inquiété les élus locaux, et le Sénat s’en fait l’écho. Des difficultés réelles n’étaient pas résolues par le caractère un peu mécanique des objectifs initiaux de – 50% entre 2021 et 2031 par rapport à la décennie passée, notamment la prime ainsi faite à ceux qui avaient déjà beaucoup artificialisé par rapport aux territoires plus responsables. Il fallait aussi un nécessaire éclaircissement dans la prise en compte des grands projets nationaux qui ne pouvaient être intégrés dans le décompte local. La création d’une commission spéciale au Sénat pour répondre à ces questions et aboutir à une proposition de loi était donc légitime, et je souligne l’importance du travail mené par la présidente et le rapporteur.
Le groupe écologiste soutient ainsi plusieurs propositions de cette PPL, mais, car il y a vraiment un très gros « mais », ne peut pour autant en soutenir plusieurs propositions importantes.
3 mesures nous semblent particulièrement problématiques. Tout d’abord, si nous soutenons la création d’un compte spécial pour les projets d’envergure nationale, il n’est pas possible de les passer purement et simplement par pertes et profits, sans les réaffecter aux enveloppes régionales suivant une règle à préciser. Sinon on remet simplement en cause l’idée même du ZAN… À ce stade, ce point n’est pas éclairci… et il reviendra aussi à l’État de préciser comment il s’applique à lui-même cet objectif de réduction de la consommation des terres naturelles, agricoles et forestières.
Ensuite, si nous soutenons les processus de renforcement en amont de la concertation, avec une conférence inter-SCoT ou ZAN renforcée, nous ne pouvons remettre en cause le rapport de compatibilité dans le fascicule réglementaire entre SRADDET, SCoT et PLU, sauf à prendre le risque que les élus de certains territoires ne rejouent le match en aval, ce qui conduirait à une multiplication des contentieux et à un ralentissement évident de la mise en œuvre du ZAN.
Enfin, l’ajout des terrains « herbacés » des particuliers dans la nomenclature après 2031, est une véritable aberration, qui pourrait permettre des lotissements avec de plus grandes parcelles de jardins dans la période 2031-2050 que dans la précédente décennie, où la comptabilisation se fait sur la base de la consommation des ENAF.
Ce point est pour nous un vrai sujet de préoccupation, découlant aussi d’un changement de méthode dont nous aurions pu nous passer, en restant sur une logique de préservation des ENAF jusqu’en 2050.
Nous déposerons un amendement important en ce sens, qui propose aussi de préciser, ce qui est une véritable faiblesse de cette loi, les consommations maximales de foncier entre 2031 2050, avec une décélération progressive qui nous amène au zéro artificialisation en 2050.
Ces 3 points, s’ils devaient rester dans la PPL, ne nous permettront pas de la voter.